La dernière escale du voyage fût aussi la plus émouvante. Il est impossible de faire un voyage ferroviaire dans cette partie de la Thaïlande sans évoquer la ligne Siam-Birmanie, aussi connue sous le nom de voie ferré de la mort. Et c’est à l’occasion de notre passage sur le fameux pont de la rivière Kwaï et notre escale a Kanchanaburi que nous avons eu l’occasion de faire un retour sur cette sombre période.
Oui, le pont sur la rivière Kwaï existe bel et bien, et n’est pas qu’un nom dans un livre/film (même s’ils ont dû renommer ce bout de rivière Kwaï Yai, la véritable rivière Kwaï étant un confluent de celle-ci). Ceux qui sont familier avec le film ou le livre sauront déjà que ce pont a été construit par des prisonniers de guerre des Japonais lors de la seconde guerre mondiale.
Le pont ayant été en partie détruit par des raids alliés à la fin de la guerre, mais les japonais le restaurèrent à titre de dommages de guerre à la fin du conflit. Les parties rectangulaires datent de la restauration, tandis que les travées arrondies sont d’origine (et proviennent d’un pont démonté à Java, en Indonésie). Ce mélange lui donne son look distinctif.
Le pont peut aujourd’hui être emprunté à pied ou en train. Notez les petites plates-formes qui permettent aux piétons de s’écarter pour laisser passer les trains.
La visite commence par une petite croisière en barge, qui nous permet d’admirer le pont par dessous, ainsi que le paysage verdoyant autour. Nous avons aussi droit à un cours d’histoire sur la guerre dans la région et la construction de la fameuse voie ferrée de la mort.
En 1942, le Japon envahi la Birmanie. Mais pour soutenir leurs troupes là-bas, le Japon dépendait de la voie maritime, devant faire passer troupes et provisions autour de la péninsule malaise, à travers le détroit de Malacca puis le long de la mer Andaman, route qui était longue et vulnérables aux attaques sous-marines des alliés. Ils décidèrent donc de construire une ligne de chemin de fer à travers la jungle, entre la Thaïlande et la Birmanie.
Après avoir débarqué dans un temple à l’allure très chinoise, nous montons dans des bus en direction du Thailand-Burma Railway Center, un musée sur ce chemin de fer, ou nous pourrons en apprendre beaucoup plus sur le sujet (par contre, les photos étaient interdites, vous n’aurez donc rien pour illustrer le sujet).
Les travaux commencèrent juin 1942 et devait initialement durer 3 ans. Mais la perte de vitesse du Japon et les besoins dans cette région firent que la date d’achèvement des travaux fut avancée à décembre 1943, et le 17 octobre 1943 (en avance par rapport au planning), le tronçon nord, au départ de la Birmanie, et le tronçon sud, au départ de la Thaïlande, furent reliés.
La construction de ce chemin de fer fut un accomplissement impressionnant. Ce chemin de fer mesurait 415 km, et fut construit à travers des jungles montagneuses et de nombreuses rivières (il comportait plus de 600 ponts !), et fut construit dans un laps de temps extrêmement court, et dans des conditions des plus difficiles (chaleur et humidité, mauvais traitements, manque de matériel, de nourriture, de soins, etc.). Tout ceci fit que la construction de ce chemin de fer fût une prouesse d’ingénierie, mais malheureusement aussi une véritable hécatombe.
Les chiffres officiels indiquent que 12621 prisonniers de guerre, soit 20% environs de ceux qui travaillèrent sur ce chemin de fer, moururent lors des travaux. Et c’est sans prendre en compte le sors des milliers de travailleurs asiatiques qui furent « embauchés » pour aider à ceux-ci, et qui étaient généralement bien plus maltraités que les prisonniers de guerre. Le gouvernement australien estime lui qu’environ 90 000 des 250 000 travailleurs asiatiques – soit 36% – et 16 000 des 60 000 prisonniers de guerre – soit 26 % – aillant travaillé sur ce projet moururent, ce qui lui valu le surnom de « chemin de fer de la mort ».
Après la guerre, les restes des morts, qui étaient enterrés un peu partout le long de la ligne dans des camps de prisonniers, furent réunis dans 3 cimetières de guerre, dont l’un à Kanchanaburi, juste en face du musée.
Ce fût l’occasion de déposer sur le mémorial une gerbe de fleur qu’on nous avait donné la veille au soir, en souvenir de tous les travailleurs morts à la tache.
Merci pour ce bel article sur un sujet dur. Comme toujours les photos donnent envie de voyager.
Merci ! J’en apprends encore tous les jours sur l’histoire de la région, histoire bien souvent oubliée de nos livres d’histoire occidentaux. Et pourtant, elle est cruciale pour comprendre le contexte géopolitique actuel du coin.
Intéressant et émouvant à la fois, la visite doit être assez impressionnante avec tout ce back-ground historique…
Et sinon j’ai adoré le mini Temple du Ciel colorisé comme un bonbon arc-en-ciel 😉
Oui, un peu de couleur ne fait pas de mal entre 2 visites plus lourdes ^^.
J’ai toujours trouvé qu’il se dégageait une solennité monstre de ces cimetières et autres mémoriaux de guerre. Et j’apprécie beaucoup ces petites pauses réflectives, même si elles ne sont pas vraiment faciles.
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